longtemps je me suis fondue
aux murs
contaminés
de mon environnement initial
où se déployait le sordide
partout étalé
comme une lente coulée de lave radioactive

j’aspirais à la transparence
non pas celle qui dénude et révèle
une transparence littérale
celle de la disparition
je m’immobilisais
sous la poigne qui enserrait ma gorge
un étau depuis mon premier souffle
une constante constriction
qui affinait, amenuisait mon cou
telle une tige florale qui se déploie
en bourgeon inabouti
enroulé de plus en plus sur lui-même
jusqu’à forger un nœud
duquel a émergé
mon fil de fer
où brillent désormais
les pointes de mes barbelés

j'étais une présence filaire
trouée, parcellaire
formée de mailles invisibles
qui laissaient filtrer les hurlements de rage
et tous les coups
d'un corps étranger, immense
trop lourd à repousser
qui savait s'écraser
sur mes linéaments informes
je me suis effacée
jusqu'à ce qu'il ne subsiste
ni défaut de posture
ni aucun visage par lequel exprimer
ni la souffrance, permanente
ni la honte de n’avoir jamais eu la force
de me défendre

rien n’a jamais percé l’ombre floue
derrière laquelle je me tapissais
ni l'incompréhension
ni le grondement croissant de la colère
que j'ai concentrée
en une seule fréquence nette
entre mes synapses
sur les pointes de mes barbelés
la poigne vient maintenant
lacérer ses chairs déliquescentes

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photogrammétrie | modélisation 3D | images numériques | texte :
KAROLINE GEORGES